Entrevue avec Samuel Busque du groupe Noir Silence

Article et entrevue : Annabelle Lacroix
Photos : Phil Thibodeau

Noir Silence fait parti du paysage québécois depuis plus de 25 ans. Connu entre autres pour ses succès On jase de toi, Made in USA et Malade, le groupe ne cesse de se réinventer. Espace Country a eu la chance de s’entretenir avec Samuel Busque, l’un des guitaristes du groupe, pour faire un survol de leur grande carrière.

Comment le groupe Noir Silence s’est-il formé? 

« Au début des années 1990, nous étions tous au Cégep Beauce-Appalaches et j’avais remarqué les musiciens Jean-François Bernatchez, Jean-François Dubé, Martin Robby et Michelle Lambert pendant les mercredis étudiants à l’école. Ils se démarquaient vraiment. Puis, en décembre 1992, je suis allé à Montréal et j’ai vu l’affiche du concours Cégeps rock. J’ai pris le numéro de téléphone du concours et, au début janvier, j’ai appelé les musiciens. On s’est rencontré à l’école et on a pratiqué un petit peu. On s’est ensuite trouvé un nom de band : Noir Silence. On s’est inscrit au concours et on est arrivé en deuxième position même si on avait seulement répété sept fois ensemble. Le nom du band n’a jamais changé. À partir de ce moment-là, c’était parti! »

Que s’est-il passé par la suite? 

« Grâce au concours, on a gagné une petite bourse. On a mis 1000$ chacun de plus et on a enregistré un démo qu’on a vendu à 2000 copies. L’année suivante, on a participé encore une fois au concours. On n’a pas gagné, mais on a rencontré notre gérance là-bas. Ne pas remporter le concours a probablement été la meilleure affaire qui ne pouvait pas nous arriver! Simultanément, on enregistrait notre premier album sur lequel on retrouve la chanson On jase de toi. Le tout s’est passé en 18 mois : du premier concours à On jase de toi. » 

Avez-vous fait d’autres concours par la suite? 

« Oui. Dans le temps qu’on enregistrait l’album, on a fait l’Empire des futures stars. C’était gros! En même temps que Cégeps rock, on a aussi fait Cégep en spectacle. On courait un peu les concours pour faire de la scène et pour se réchauffer. Après les 2000 copies vendues du démo, on faisait déjà beaucoup de festivals en Beauce. Un moment donné, on a juste arrêté de faire des concours parce qu’on était prêts. »

En parlant de On jase de toi, peux-tu nous parler de cette chanson? Comment est-elle arrivée?

« On jase de toi, c’est une histoire complètement surréaliste. Au début, on ne voulait pas faire la chanson, car elle ne correspondait pas à notre vision de l’album. Dans nos têtes, on était un mélange de Journey, de Bon Jovi et de Metallica. On faisait des chansons compliquées et des petites chansonnettes, on n’en voulait pas. On la gardait donc en back up. Quand est venu le temps d’enregistrer l’album, on a réalisé que de mettre des instruments à cordes sur toutes les chansons, ça coûtait cher! On a donc changé d’idée en trois secondes. On m’a dit : « Ok Sam, prend la guit, on va faire On jase de toi! » Je suis donc allé au magasin à côté du studio, j’ai pris une guitare et on a enregistré la chanson en moins de temps que ça prend pour la jouer! C’est un peu un accident. » 

Dans toute votre carrière, y a-t-il un prix dont vous êtes particulièrement fiers d’avoir remporté?

« Oui plusieurs! En fait, il y a eu trois phases à Noir Silence. Premièrement, Cégeps rock a été le starter qui a mis le feu au gaz! Après ça, on a gagné Groupe de l’année canadien en bas de 18 ans aux YourTV Youth Achievements Awards. Ça nous a donné un deuxième coup de confiance. Ensuite, c’est bien sûr le gala de l’ADISQ en 1996 avec trois Félix en un soir. On ne s’en attendait pas du tout.  Personne ne nous connaissait à Montréal et on était impressionné par tout le monde. On s’était pratiqué à faire des remerciements en prenant une bière et en riant de nous autres! On se disait que ça n’arriverait jamais. Mais, quand on est arrivé au Centre Bell pour le gala et qu’on a vu qu’on était assis à la troisième rangée, on a commencé à capoter un peu. Puis, quand les présentateurs ont nommé le band pour la première fois, il s’est passé quelque chose de spécial. On venait de remporter le prix Groupe de l’année dans la même catégorie que les Frères à ch’val, les Colocs, Beau Dommage et Zébulon. Ensuite, on est monté pour Découverte de l’année et pour Album rock de l’année! »

Vers la fin des années 1990, le groupe s’est malheureusement séparé. Peux-tu nous parler un peu de ce moment-là?

« Oui, c’était en 1999 et on venait de sortir l’album Piège. Jean-François Dubé était malade et on devait annuler des spectacles. En plus, il se faisait monter contre nous, les quatre autres membres du band. On était devenu le côté obscur du groupe… Un jour, on est allé chez Martin, Jean-François nous a annoncé qu’il quittait le groupe et il est parti. Nous, on s’est consulté pendant trois minutes et on a reparti la machine! On ne pouvait pas le retenir, son choix était clair dans sa tête. Aujourd’hui, je pense que ce geste était nécessaire à cette époque. Ça a tout changé en positif quand il est revenu en 2008. C’est devenu plus simple pour tout le monde! » 

Justement, comment son retour s’est-il passé?

« En 2008, on a eu une invitation pour aller jouer à Saint-Georges-de-Beauce pour le 1er juillet et on a décidé de se donner une chance pour un soir. Je nous vois encore aller répéter, c’était poignant au coeur de se retrouver après tout ça. Le soir du spectacle, il y avait des milliers de personnes! Il mouillait à siaux : une belle grosse pluie chaude d’été! Y’a personne qui est parti! C’était extraordinaire! Après le spectacle, on était en dessous de la scène et tout le monde pleurait. On s’est dit : « Ok, donnons-nous une chance. » Depuis ce temps-là, on ne s’est pas quitté. »

On vous voit beaucoup plus dans les médias récemment. Pourquoi selon toi?

« C’est vrai qu’on nous voit plus dans les médias ces temps-ci, mais on n’a jamais arrêté pour autant. Je crois que c’est parce qu’il n’y a plus beaucoup de groupes qui sont encore ensemble après 30 ans au Québec. Les gens qui écoutaient notre musique ont vieilli avec nous. Ils ont fini de payer leur deuxième voiture, la plus jeune s’en va à l’université… Ils se retrouvent en tant que couple et en tant qu’humain. Ils ont peut-être le goût de revenir à leurs racines musicales. C’est une question de timing je crois. On est revenu à la mode! » 

« Après le spectacle, on était en dessous de la scène et tout le monde pleurait.
On s’est dit : « Ok, donnons-nous une chance. »
Depuis ce temps-là, on ne s’est pas quitté. »

L’année 2019 a commencé en force pour Noir Silence avec l’apparition de Jean-François Dubé à La fureur, spéciale 20 ans! On se rappelle tous du numéro où Boom Desjardins (La Chicane), Steve Veilleux (Kaïn), Jonathan Painchaud (Okoumé), Stéphane Yelle (Yelo Molo) et, bien sûr, Jean-François Dubé (Noir Silence) ont accepté de se réunir le temps de quelques minutes. Peux-tu nous parler de ce moment magique pour les téléspectateurs québécois?

« La fureur a été un tournant pour l’année 2019. C’est comme si les gens ont réalisé que le groupe Noir Silence existait encore. C’était un numéro magnifique. Il y avait quelque chose de très beau, très solennel, très humble. Le numéro a été fait avec beaucoup d’humilité : des guitares acoustiques et des petits bouts de chacun des plus grands succès de ces groupes-là. Ça a bien commencé 2019. » 

En 2019, vous avez sorti le EP Tiens-ma bière aux couleurs plutôt country. Pourquoi vous êtes-vous dirigés vers ce style?

« On a tous fait beaucoup de country on the side. Moi, j’ai fait du chansonnier country, les autres membres ont eu des bands country. Naturellement, ça revient dans l’attitude. Dans On jase de toi et dans Soleil, on sentait déjà ces couleurs country. Noir Silence s’est toujours réinventé. On n’a jamais fait deux fois le même album. On s’est simplement demande : « On est rendu où? » On aime tous le new country. Ça nous tentait de faire ça! » 

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Qu’est-ce que le spectacle Légion avec Vilain pingouin et Les frères à ch’val? 

« Légion, c’est un recoupement des années 1990 et 2000 avec des bands qui ont marqué cette génération-là. Malheureusement, il n’y en a plus tellement qui sont sur la route et qui existent encore aujourd’hui. Quand les gens viennent voir un spectacle de Légion, ils peuvent chanter de la première à la dernière chanson! C’est un spectacle en trois parties, mais il n’est pas rare que tous les groupes se retrouvent pour chanter quelques succès tous ensemble. De me retrouver sur la scène avec ces groupes-là, c’est incroyable. Avec Noir Silence, on a joué avec les Backstreet Boys, ZZ Top, Spin Doctors et plein d’autres groupes internationaux. Mais, pour moi, voir des chansons comme Le train, Salaud et François je suis plus ému. Entendre ces chansons-là chantées par Rudy Caya et passer du temps avec tous ces gars-là, ça me fait capoter. Je suis vraiment fier du projet. » 

Qu’est-ce qui s’en vient pour Noir Silence en 2020? 

« Premièrement, on va travailler un concept de spectacle country où on va réadapter nos chansons dans ce style. Aussi, on aimerait beaucoup faire un projet symphonique! On va évidemment s’approcher des festivals encore cette année. Moi, il me reste trois festivals pour faire le tour de tous les festivals que je voulais faire dans ma vie : le Festival du Cochon de Sainte-Perpétue, La Foire du camionneur de Barraute et les Régates de Valleyfiled. C’est mon top 3 des festivals où j’aimerais jouer avant d’accrocher ma guitare. Je ne pense pas que ça va se faire cette année, mais on travaille là-dessus! » 

Pour ne rien manquer des activités de Noir Silence, rendez-vous sur leur site web au www.noirsilence.com
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